Aïe aïe ! leçon d’humilité en perspective, je présente ici le résultat de mes tous premiers pas sur une prise de vue exclusivement argentique lors du mariage de mon bien aimé beau-frère. Il fallait bien une bonne âme pour se laisser convaincre 😉

Ce partage me semble utile car il est rare d’avoir un retour d’expérience en toute transparence sur un grand nombre d’images.

Après tout le secret le mieux gardé de la photographie n’est-il-pas de ne mettre au grand jour que les quelques plus belles photos ? Les autres subissant le sort réservé au champignons: oubliés dans un coin sombre et parfois humide …

Mais comme on apprend plus de ses erreurs (ou de celles des autres) que de ses réussites, il plus intéressant de montrer plus que pas assez. C’est également beaucoup moins partial.

Contexte et objectifs

 

Mon intention personnelle était surtout de pouvoir constater in situ tout ce que pouvait impliquer un tel choix en terme de materiel mais surtout en terme de plaisir ou d’inconfort à la prise de vue dans une situation qui n’est pas organisée pour moi.

De nos jours c’est le domaine privilégié du numérique compte tenu d’abord des niveaux de lumières rencontrés au dessus de la Loire en France. Et surtout de la variation de ceux-ci lors d’un reportage, intérieur, extérieur, ombres, pleine lumière, lumières diffuses, lumières dures etc …

Facilité et flexibilité en font un excellent outil de prise de vue pour l’usage commercial. Mais on perd le rendu et surtout l’approche photographique, enfin … pour ma part en tout cas.

 

1. Livre d’or

 

Quelques photos prises avant le mariage pour agrémenter le livre d’or des mariés:

 

Photo de Mariage Argentique - Guestbook

 

Noir et Blanc: kodak Tri-X à EI 200 sauf les portraits serrés en Fuji Acros à EI 50

Couleur: Kodak Portra 400 à EI 200 sauf pour la dernière à EI 800 poussée à +2

Appareils: Contax 645 + Zeiss 80mm F/2 Planar et Canon EOS 1 V + Canon 16-35mm F/2.8 pour la Tri-X

Constat:

Les scans couleurs (ainsi que l’Acros) faits dans un labo parisien très standard (scans automatiques) sont très aléatoires dans leur rendu colorimétriques. La balance des blancs change d’un cliché à l’autre et le moteur de scan automatique pousse le contraste au maximum ce qui rend le cliché quasi irrécupérable pour « l’alléger » à sa convenance. Bref du scan de lecture oui, mais certainement pas de niveau d’archivage à mon goût.

En dehors de l’aspect technique, il faut avouer qu’il m’est plus difficile de communiquer avec des personnes qui me connaissent autrement qu’à travers l’objectif …

Détail pratique qui a son importance: tous les clichés fait à l’EOS 1 V avec une mise au point delà de 3 mètres se sont avérés flous et inexploitables … Du désavantage d’acquérir du matériel d’occasion non révisé sur la toile…

La faute m’en incombe pour une bonne part car je n’avais pas testé cette optique auparavant sur ce boitier en particulier. Hors avec d’autres optiques le problème était quasi indétectable. La mise en révision chez Vilma (agréé Canon) a permis de tout remettre d’aplomb. L’optique était également en cause, mais mes autres boitiers n’avaient pas révélés le souci de cette optique qui a subi un mauvais traitement.

Un cumul de petits problèmes est souvent la cause d’une malchance …

En bref, en argentique on ne constate les problèmes subtils qu’APRES la prise de vue. Etre parano avec son materiel n’est donc pas si stupide que ça … d’autant que tout souci matériel provient à 99.9% du temps d’une faute de l’opérateur. Pour avoir utilisé beaucoup de boitiers je peux affirmer que la majeure partie du matériel professionnel produit peut subir de très gros abus sans broncher.

J’ai donc pour ma part appris à être encore plus vigilant sur les questions de matériel …

2. La robe en réalisation

L’idée était surtout de conserver quelques moments lors des ajustements chez le créateur Laurent Kapelski qui apparait tout en bas.

 

Photo de Mariage Argentique - Confection Robe

 

Noir et blanc: Kodak Tri-X à EI 1600 poussée à +2

Appareil: Contax 645 + Zeiss 80mm F/2 Planar

Mesure: Sekonic L-208 Twinmate en incident

Développement: perso au Kodak HC110

Recadrages: aucun

3. Le mariage civil

 

A la campagne dans un petit village de Normandie …

 

Photo de Mariage Argentique - Champêtre

 

Noir et Blanc: kodak Tri-X à EI 200

Couleur: Kodak Portra 400 à EI 200 sauf pour la mariée seule en Fuji Pro 400H à EI 100

Appareils:

  1. Contax 645 + Zeiss 80mm F/2 Planar pour la couleur
  2. Canon EOS 1 V + Canon 16-35mm F/2.8 pour le noir et blanc
  3. Mamiya C330F + Mamiya Sekor 105mm DS BD pour le format carré

Mesure: Sekonic L-208 Twinmate en incident

Développement: perso uniquement sur le noir et blanc au Kodak HC110

Recadrages: aucun

Constat:

Même chose qu’au point 1. : les scans couleurs du même labo sont très aléatoires et quasi impossibles à reprendre (format JPEG). Contraste et saturation très prononcés, il est difficile de mettre tous les clichés en cohérence colorimétrique.

Je n’ai pas repris les scans par manque de temps à y consacrer. Sans être un spécialiste du scan couleur, l’un des avantages à le faire soi-même c’est la possibilité de garder les mêmes paramètres d’un clichés à l’autre permettant ainsi des traitements homogènes et groupés. Mais le scan par essence est très chronophage …

4. Le mariage religieux

 

Une chose qu’il faut garder à l’esprit c’est que les photographes de mariage pro les plus en vogue organisent leur intervention autour d’une logistique qui leur est favorable pour l’image. Jusqu’à parfois « suggérer » (ou imposer) le timing du mariage autour de leur prérogatives. Cela se comprend dans le cadre d’une clientèle spécifique.

Bref ici rien de tout cela, l’approche est décontractée « à la française », non commerciale … prise de vue sur le vif sans intervention, autre que les photos en duo. Je n’ai donc rien dicté dans le style de « qui est habillé quand » etc …

Malgré « l’aventure » (pour moi) les mariés, même sympas, attendaient des photos à l’arrivée. Je ne suis donc pas parti dans un délire perso et suis donc resté sage dans l’approche (classique). Je ne voulais pas jouer au cow-boy la première fois, ça aurait été un peu trop nombriliste, voire irresponsable …

Photo de Mariage Argentique - Religieux

Noir et Blanc: kodak Tri-X à EI 200 et EI 1600 poussée à +2, Delta 3200 à EI 1600

Couleur: Kodak Portra 400 à EI 200 et EI 1600 poussée à +2 (église, soirée) et Fuji Pro 400H à EI 100

Appareils:

  1. Contax 645 + Zeiss 80mm F/2 Planar pour la couleur
  2. Canon EOS 1 V + Flash en soirée + Canon 16-35mm F/2.8 pour le noir et blanc, et pour la couleur sur les danses
  3. Mamiya C330F + Mamiya Sekor 105mm DS BD pour le format carré

Mesure: Sekonic L-208 Twinmate en incident

Développement: perso uniquement sur le noir et blanc au Kodak HC110

Recadrages: aucun

Constat:

Changement de labo pour les scans couleurs. C’est un labo un peu plus spécialisé dans ce type de travaux. Malgré tout chaque cliché exposé sous la même lumière avec les mêmes paramètres d’expositions sont légèrement différents. Ce qui oblige à  traiter chaque cliché individuellement.

Pour autant le travail global est plus « lisible ». Malgré tout cela n’est pas encore satsifaisant. Cela provient du manque de relation avec le labo.

Pour avoir un traitement aux petits oignons même de la part d’un labo spécialisé il faut s’y fidéliser auparavant et « créer » une relation. Je fais peu ou pas de travaux couleurs pour mon propre compte et cela bien entendu ne me permet pas d’être traité comme un « client » spécial. Je n’ai donc pas droit au même opérateur selon les envois et de fait chaque rouleau voire cliché  est traité de façon individuelle sans vision globale définie.

 

 

5. Conclusion

 

Cela n’étonnera personne mais j’enfonce quand même une porte ouverte: tout bon travail est affaire d’expertise. A chacun d’évaluer le niveau du « bon travail » et ce que recouvre le terme « expertise » …

Pour ma part j’en retire les points suivants négatifs d’abord:

  1. Le manque de relation avec un labo est clairement un frein pour de bons résultats colorimétriques.
  2. L’utilisation du film couleur poussé demande un approfondissement
  3. Etre plus prévoyant avec son materiel (ça c’est réglé: je suis officiellement parano)
  4. Recharger les pellicules a été un vrai stress, pour ne pas se retrouver à sec au mauvais moment
  5. 3 Appareils qui se rechargent différemment c’est trop, le C330F a vite fini dans le sac
  6. Logistique: ne pas quitter son materiel ou avoir un assistant serait d’une grande aide (*)
  7. Manque de créativité du au souci de performer sur la base. Mais c’est le lot de toute première experience raisonnable.

 

(*) J’ai eu un gros problème sur la prise de vue à l’église: javais prévu flash et Delta 3200 que j’avais laissé dans une pièce dans laquelle je voulais repasser juste avant de partir à l’église. Je n’aurais pas fait ça si je n’avais pas été en famille … Quoiqu’il en soit un gentil membre de ma grande et belle famille a cru bon de fermer tout à clef et de partir avant moi. Je n’avais donc pour couvrir la cérémonie que ce que j’avais sur moi: pas de flash, de la Portra et de la Tri-X. J’ai donc pu couvrir tout ce qu’il fallait mais je n’ai pas pu réaliser ce que j’avais en tête. Dommage, et surtout frustrant car c’était la partie créative que je voulais pouvoir réaliser (travail de lumière).

 

Et les points positifs ? si si il y en a:

  1. Le plaisir de la prise de vue est bien réel malgré les contraintes materielles
  2. Le rendu authentique est bien au rendez-vous
  3. Le sentiment de piloter plutôt que d’être conduit par le boitier est sans pareil (on fabrique plus qu’on essaie)
  4. Le constat que la mise au point manuelle dans l’action n’est pas impossible

Plus globalement il faut avouer qu’être bien situé géographiquement n’est pas sans lien avec la qualité des résultats. En argentique il nous faut tout de même beaucoup de lumière pour faire briller le sujet.

Rien d’étonnant donc que les photographes de mariage professionnels qui travaillent à l’argentique présentent sur leur books des photos réalisées pour la majeure partie en dessous de la Loire pour la France, sous les tropiques ou en Californie pour les USA. L’assurance d’avoir suffisament de lumière au bon moment est un gros facteur de succès.

Il n’est bien sûr pas impossible de faire de même dans le Nord de l’Europe mais les conditions sont certainement moins propices aux clichés commerciaux. De même il est interessant de constater que les photos de cérémonie intérieure (dans une église par exemple) font clairement partie de l’exception en argentique. Cela est en grande partie du à la gestion difficile du constraste en basse lumière (en l’absence de flash) dès qu’on pousse un film.

La pratique de la photographie de mariage à l’argentique est donc bien une affaire d’expertise. Tant au niveau technique qu’au niveau relationnel et commercial, afin de réunir tous les paramètres qui permettront de créer un contexte aussi favorable que possible à la prise de vue.

Après cette première experience il semble que le secret se situe à cet endroit précis …