Aujourd’hui je propose une comparaison entre différents papiers photos argentiques. Avec tirage sous agrandisseur en chambre noire donc sur gélatine argentée.
J’étais tenté par l’essai du papier Ilford MG ART 300 mais connaissant mon penchant pour les papiers texturés, qui me vient de la pratiques des procédés anciens, et mon enthousiasme toujours flamboyant quand j’effectue un tirage, je voulais avoir une référence objective pour tempérer mes ardeurs et éviter de briser le cochon tirelire sur un coup de tête encore une fois.
D’une façon génerale j’utilise le papier RC pour faire toutes sortes d’essais. Il est peu cher et son traitement est rapide. Je choisis donc comme référence le papier Ilford MG IV RC DELUXE qui est certainement le plus répandu et le plus disponible. Tout au moins en Europe de l’ouest. Pour des raisons de facilité de lecture je prends la finition Pearl (perlée) qui limite les reflets indésirables. Cliquer pour agrandir l’image ci-dessous:
Ilford MG IV RC DELUXE, Fomabrom Variant Matt, Fomatone MG Classic Matt, Ilford MG ART 300
Pourquoi comparer des papiers Foma avec les Ilford? Simplement car quand je suis passé chez mon fournisseur il n’avait plus d’Ilford FB Classic ni d’Ilford FB Warmtone… Pour la comparaison qui m’intéresse cela n’est pas vraiment un problème: le Fomabrom est un papier comparable à son équivalent Ilford. Le Fomatone quand à lui est un peu plus particulier mais il donnera une référence dans les tons chauds.
Pas de papier brillant car je pariais plutôt sur un rendu mat du papier Ilford MG ART 300, et quoi qu’il en soit j’ai toujours eu un penchant pour les rendus mats.
Tous les tirages sont des tirages directs ~10x15cm, pas de masquages ou autres manipulations, les papiers sont exposés, révélés (Ilford Multigrade 1+9), stoppés (Ilfostop 1+19), fixé (Ilford Rapide Fixer 1+4) et séchés suspendus c’est tout. Puis mis sous une pile de livres une fois secs sauf pour le RC. La mise sous livres une fois sec n’est pas la meilleure méthode pour obtenir un beau tirage plat, mais j’y reviendrais une autre fois.
Fomabrom Variant Matt, Fomatone MG Classic Matt, Ilford MG ART 300
Concernant le séchage, première conclusion: les papiers Foma n’ont rien de particuliers ils sèchent comme les autres en s’enroulant sur eux mêmes, le RC lui reste plat comme d’habitude, mais chose intéressante le papier Ilford MG ART 300 sèche avec une très nette tendance à moins se courber que les autres, il sèche quasi à plat. Un très bon point donc côté pratique. J’aurais pu m’en douter compte tenu de l’épaisseur de la base.
Le négatif utilisé est un cliché sur Kodak Tri-X exposé à EI 200 et développé dans du HC110 en dilution B durant 5min 30sec., le tirage de référence est le tirage direct RC sous filtre Ilford Multigrade de Grade 2. Les autres ont été tirés pour s’en approcher le plus et ainsi me donner une référence de correction d’exposition et de contraste pour passer d’un papier à l’autre dans cette situation de contraste moyen.
- Ilford MG IV RC DELUXE PEARL: exposé 9 secondes sous filtre Grade 2
- Fomabrom Variant Matt: exposé 7secondes sous filtre Grade 2
- Fomatone MG Classic Matt: exposé 30 secondes sous filtre Grade 3
- Ilford MG ART 300: exposé 18 secondes sous filtre Grade 2
On voit bien apparaître les différentes sensibilités des papiers. Tous se tiennent en terme de contraste sauf bien entendu le Fomatone qui est un papier très peu sensible et à très faible contraste, ce qui lui confère une grande gamme tonale. J’aurais d’ailleurs très bien pu augmenter le contraste d’un demi-grade supplémentaire pour me rapprocher un peu plus du contraste du tirage RC.
Fomabrom Variant Matt, Fomatone MG Classic Matt
Question tons, on remarque que les tirages barytés sont un peu plus chauds que le tirage RC plus froid (neutre en fait), avec un pointe de « violette » (à mes yeux) ou magenta dans les tons clairs pour le Ilford MG ART 300 qui à ma grande surprise est très très plaisante (attention petit cochon!).
Ci-dessous une référence qui permet d’apprécier la différence de tons chauds et qui fait apparaître un peu plus la très légère tinte « violette » balancée par une pointe de vers dans les ombres. Ou bien c’est moi qui fume, bref le mieux est de cliquer pour agrandir l’image.
Fomatone MG Classic Matt, Ilford MG ART 300
Cependant avec le Ilford MG ART 300 il faut avouer que si on veut conserver le même contraste dans les tons clairs que ceux obetnus avec le Fomabrom Matt alors on perd un peu dans les ombres. Ce papier à la belle texture pousse un peu plus les tons sombres vers les noirs que les autres papiers barytés.
Mais il n’y a pas que ça: on peut également noter que la nature semi-brillante de sa surface pousse plus facilement les tons sombres vers une impression de noirs sans détails. Les détails sont bien là mais les microreflets empêchent de les discerner.
Fomabrom Variant Matt, Ilford MG ART 300
Ce n’est pas comme un papier brillant où il suffit de changer d’angle pour éviter la reflexion, ici la texture a une orientation prédominante donc sous un certain angle tout va mieux. Mais il reste des micro-reflexions dues à la nature inévitablement aléatoire de la texture.
On le voit bien dans l’image suivante, la lecture d’un vrai papier mat à gauche n’est pas génée par des réflexions qui font disparaître les détails:
Fomabrom Variant Matt, Ilford MG ART 300
Mais il ne faut rien exagérer l’Ilford MG ART 300 est bien moins réfléchissant qu’un papier RC perlé (qui donc, déjà, n’est pas totalement brillant):
Ilford MG IV RC DELUXE, Ilford MG ART 300
Pour m’assurer de mes conclusions j’ai fait le même exercice avec une image à fort contraste. Les détails dans les ombres existent sur le négatif mais j’ai décidé de le tirer en dur pour obtenir un tirage direct visuellement agréable et qui retienne les détails dans les tons clairs.
Dans ce cas j’ai tenté de préserver une exposition équivalente pour le visage. J’y ai passé moins de temps (les tests ce n’est pas le truc le plus passionnant à produire) et j’aurais clairement du affiner un peu plus l’exposition des deux derniers papiers, mais je pense qu’on peut tout de même en tirer suffisamment d’informations pour les partager ici.
Ilford MG IV RC DELUXE, Fomabrom Variant Matt, Fomatone MG Classic Matt, Ilford MG ART 300
Le négatif utilisé est un cliché sur Ilford Pan-F Plus exposé à EI 25 et développé dans du HC110 en dilution 1:47 durant 6min, le tirage de référence est le tirage direct RC sous filtre Ilford Multigrade de Grade 3. Les autres ont été tirés pour s’en approcher le plus et ainsi me donner une référence de correction d’exposition et de contraste pour passer d’un papier à l’autre dans cette situation de fort contraste.
- Ilford MG IV RC DELUXE PEARL: exposé à 16.5 secondes sous filtre Grade 3
- Fomabrom Variant Matt: exposé à 13.2 secondes sous filtre Grade 3
- Fomatone MG Classic Matt: exposé à 240 secondes sous filtre Grade 4
- Ilford MG ART 300: exposé à 49 secondes sous filtre Grade 3
Fomabrom Variant Matt, Fomatone MG Classic Matt, Ilford MG ART 300
Sur ce tirage très contrasté on note que la préservation des tons clair entraîne clairement une perte d’information dans les ombres plus importante sur le tirage Ilford MG ART 300. J’aurai pu le tirer légèrement moins dense mais ça n’aurait rien changé car la marge de manoeuvre reste faible pour ne pas perdre les hautes lumières.
Non, pour préserver les ombres il aurait fallu réduire le contraste d’un demi-grade, mais on aurait changé d’ambiance, et j’avoue que ce tirage d’essai me plait tel quel: à fond les ballons.
Fomabrom Variant Matt, Fomatone MG Classic Matt
Sur les tirages ci-dessus on peut noter que le fort contraste, la longue exposition et surtout la gradation très continue du Fomatone ont fait apparaître un défaut de développement du négatif dans le ciel qui est totalement absent sur les autres tirages.
Fomabrom Variant Matt, Ilford MG ART 300
Ci-dessus, outre l’exposition qui peut-être affinée on peut clairement se rendre compte de la différence de contraste entre ces deux papiers. Enfin dans l’image ci-après on peut noter les nuances de ton chaud des émulsions entre ces deux papiers dans une image assez sombre.
Fomatone MG Classic Matt, Ilford MG ART 300
Conclusion: Ce petit comparatif m’a permi de découvrir les papiers Foma que je ne connaissais pas et il faut bien avouer qu’ils ne déméritent pas. Concernant le papier Ilford MG ART 300 pour lequel je voulais avoir une référence objective: c’est bien un superbe papier à la signature très marquée, sa texture donne vraiment envie de lui trouver une série qui lui convienne. La pointe de brillance dans les tons sombres plaira à ceux qui affectionnent les forts contrastes dans cette zone. Pour ma part je pense qu’il conviendra mieux à certaines de mes images plutôt qu’à d’autres pour cette même raison.
Superbe comparaison entre les différents rendus! Au regard, le papier MG Art 300 est vraiment l’exception. Par curiosité, les bords noirs des tirages sont réalisés de quelle manière?
Merci 😉 Oui en effet le MG ART 300 est vraiment différent des autres. La texture de sa surface est très présente dans l’image, ce qui la rend très remarquable dans les aplats. C’est un papier qu’on choisit pour sa contribution très marquée à l’esthétique finale de l’image.
Concernant les bords noirs, c’est très simple à réaliser à l’aide d’un margeur ou d’un système de cache équivalent. C’est simple car ce sont les bords naturels du négatif (ça l’est beaucoup moins si l’image est recadrée), chose que j’apprécie personnellement car ils ne sont pas parfaits. Les tireurs puristes ne sont pas fanas car selon eux un bon tirage doit naturellement se détacher de son cadre blanc, une autre façon de dire que si on tire en grillant les blancs on est un piètre tireur… Ca c’est pour les puristes, il y a aussi ceux qui tirent le cadre du négatif, comme ici donc, pour prouver que le cliché n’est pas recadré et reste fidèle à celui de la prise de vue, c’était le point de vue défendu par Henri Cartier Bresson. Pour ma part je ne suis ni un tireur puriste ni HCB bien entendu mais retranscrire cette notion de fenêtre sur l’univers me semble parfois faire partie de l’image, de son message, selon le sujet…
Moins sérieusement: quel photographe ne cherche pas à mettre du noir partout? 🙂 Bref cela varie selon les auteurs.
Pour la réalisation il suffit donc d’avoir un passe-vue aux bonnes dimensions ou alors un margeur ou bien encore des caches.
Merci pour l’info. Sans offusquer les puriste, une image sertie d’un trait blanc ou noir à la Larry Bartlett met en valeur l’image. C’est après tout en quelque sorte une fenêtre!
J’aime les deux, mais j’utilise souvent Ilford parce qu’il est plus facile d’obtenir et moins cher que Foma. Je pense que Foma est mieux pour les photos « de la nuit. »
Intéressant, j’ai une experience opposée chez mon fournisseur local, ce qui est parfois un peu frustrant quand je ne peux pas obtenir ce que je veux sans délai d’une ou deux semaines pour les papiers Ilford. Concernant mes fourniesseurs en ligne, les deux sont bien stockés mais d’une façon générale j’ai une experience opposée des tarifs, mais c’est peut-être du à ma position géographique…