Nous avons déjà vu ici le principe de la mesure d’exposition en photo. Passons maintenant en revue les différents modes de mesure d’exposition (de lumière réfléchie) qu’on trouve sur les appareils récents. Nous verrons aussi à quel mode s’apparente celui de la plupart des modèles anciens qui n’en ont qu’un seul.
Tous les appareils photos reproduisent la signalétique Canon ou Nikon pour l’illustration de leur mode de mesure d’exposition. Donc dans ce qui suit les principes expliqués restent valables quelque soit le fabriquant de l’appareil.
Bref rappel historique: les premiers appareils photos n’étaient pas munis de cellule de mesure d’exposition, il fallait une cellule externe, souvent utilisée en mesure de lumière incidente. Puis avec l’apparition de cellules intégrées aux appareils la démocratisation de la photographie s’est accélérée.
A l’origine la photo était argentique bien sûr, et le problème de la bonne mesure était crucial car on ne pouvait constater la bonne exposition qu’une fois le film développé. Or la mesure de lumière réfléchie nécessite une interprétation à cause de cette histoire de gris moyen.
Les fabriquants ont donc travaillé pour établir un mode de mesure qui puisse convenir à tout le monde, professionnels, amateurs et néophytes, dans le plus grand nombre de situations possibles tout en réduisant au maximum la nécessité d’interprétation.
Et Tadaa! ils sont communément arrivés à l’élaboration de la mesure d’exposition pondérée centrale:
C’est le premier et unique mode de mesure d’exposition que l’on trouve dans des boitiers restés célèbres comme Le Canon AE-1 , le Nikon F (FTN), et aussi le Leica M6 (TTL).
On retrouve encore ce mode aujourd’hui sur tous les appareils pour des raisons historiques. Mais surtout parce que sa fiabilité en de nombreuses circonstances en ont fait une référence. Et que beaucoup de photographes auraient été déçus de le voir disparaître sur les nouveaux boitiers.
Les plus célèbres photoreporters des années 60 à fin 80 ont travaillé avec ce mode unique !
Le principe est très robuste parceque très simple : au lieu de mesurer la lumière réfléchie sur l’ensemble du cadre de façon uniforme on applique un facteur de prépondérance à la zone centrale d’environ 60%.
Dans la pratique cela revient à considérer que le sujet principal de la photo se situe dans la zone centrale. Donc si l’environnement du sujet est éclairé différemment on en tient compte seulement pour ~40%.
C’est très raisonnable car on ne parle pas de ratio extrême comme 80%/20% ou 100%/0%. C’est ce qui rend cette mesure très fiable dans la majeure partie des cas où l’environnement du sujet n’est pas éclairé de façon radicalement différente.
Pour faire face aux cas extrêmes. Canon a mis en place la mesure d’exposition partielle:
Pour un contre jour par exemple: le cas où le sujet central est éclairé par l’arrière avec une fenêtre ou autre dans son dos. Dans ce cas il préférable d’éliminer de la mesure la plus grande partie du cadre qui se situe autour du sujet. De cette façon on concentre au maximum la mesure sur le sujet.
Cette mesure est également appelée mesure d’exposition sélective. On comprend bien pourquoi: le reste du carde est tout simplement éliminé de la mesure. La partie centrale qui contribue à la mesure représente un peu moins de 10% du cadre. Le cercle illustré ci-dessus est donc sans-doute un peu trop large par rapport à la réalité.
Dans le cas du contre-jour si on utilise la mesure pondérée centrale telle quelle, la contribution de la source lumineuse environante est telle, que même à ~40% elle sera trop imporante. Elle va conduire à une sous-exposition du sujet pour ramener l’ensemble du cadre à un gris moyen (la fenêtre étant très claire).
Tandis qu’avec la mesure d’exposition partielle le sujet central, unique objet de la mesure, sera par conséquent correctement exposé.
C’est donc un mode de mesure qui convient parfaitement aux situations où le sujet et son environment sont élcairés de façon radicalement différentes.
Afin de faire une mesure encore plus précise il faut passer à la mesure d’exposition spot:
L’utilité de cette mesure est très vaste. En effet, elle permet d’être très très précise car l’unique contribution à la mesure centrale (le reste du cadre est éliminé) représente moins de 3% du cadre !
C’est le choix idéal pour faire une interprétation sans équivoque de la mesure de lumière réfléchie. Car typiquement on va choisir de mesurer une zone uniforme en éclairage et en tonalité.
C’est LE mode de mesure idéal quand on veut être précis et qu’on veut éliminer le doute sur l’interprétation d’une scène complexe. Dans un tel cas on choisi dans la scène un endroit moins complexe pour faire sa mesure.
Mais il est très rare que cet endroit choisi soit situé en plein centre du cadre. Et donc encore plus souvent qu’avec les autres mesures on va devoir procéder en 3 étapes:
- Faire la mesure d’exposition sur l’endroit choisi
- Mémoriser cette mesure
- Recadrer pour prendre la photo comme on le désire
L’étape 2 se fait différemment selon le mode utilisé:
- Mode manuel M: à l’aide son cerveau d’hominidé, prévoir quelques neurones pour cette tâche …
- Autres modes Av, Tv, P: en appuyant sur le bouton de mémorisation d’exposition …
C’est bien entendu une fonction qu’on utilise également dans les autres modes de mesure que nous venons de voir dès que le sujet n’est pas central et qu’il diffère de son environnement.
En passant on note que somme toute la mesure partielle n’est autre qu’une mesure spot avec un « spot » élargi … C’est un rafinement supplémentaire, que tous les fabriquants n’ont pas jugés utile de mettre à disposition.
Mais passons à la mesure la plus évoluée, la mesure d’exposition évaluative ou matricielle:
C’est la mesure la plus récente, en perpétuelle évolution qui est de nos jours la plus plébicitée. Elle équipe bien entendu tous les appareils de dernière génération qu’il soient argentiques ou numériques.
Elle utilise toutes les informations possibles en prenant en compte toutes les parties du cadre à travers un grand nombre de zone de mesure. Il y a donc de la pondération entre ces zones, croisée avec tout un tas d’autres informations: dont parfois les collimateurs autofocus utilisés, parfois la distance de mise au point, et même jusqu’à une base de donnée d’images caractéristiques pour les dernière générations !
Le gros avantage de cette mesure sophistiquée c’est d’éviter de tomber trop facilement dans les pièges tendus par des situations à éclairage extrême et/ou complexe. Ce qui minimise encore plus la nécessité pour le photographe d’interpréter une scène sans faire d’erreurs.
En bref c’est bien la mesure passe-partout, mais bien entendu elle ne libère pas totalement le photographe d’une interprétation simple de la situtation afin d’appliquer la bonne correction d’exposition.
Un contre-jour reste un contre jour, même ce mode de mesure ne va pas le résoudre tout seul. D’ailleurs comment le peut-il? il ne peut savoir si on veut executer une silhouette ou portrait retro-éclairé par exemple. On garde donc bien toute liberté créative.
Donc comme pour les autres mode de mesure il faudra bien sûr avoir recours à la compension d’exposition pour atteindre le résultat voulu.
In fine le choix d’un mode ou l’autre est surtout affaire d’expérience et de méthode personnelle. On peut par exemple envisager de procéder selon ces 3 approches différentes:
Approche A:
- On pointe l’appareil sur une zone simple quelque soit le mode d’exposition choisi
- On interprète la tonalité par rapport au gris moyen
- On applique une correction d’exposition
- On mémorise cette exposition
- On recadre la photo voulue
- On déclanche
Approche B:
- On pointe l’appareil sur une zone dont on sait qu’elle correspond à un gris moyen
- On mémorise cette exposition
- On recadre la photo voulue
- On déclanche
Approche C:
- On cadre la photo voulue en mode d’exposition évaluative ou matricielle
- On interprète la tonalité par rapport au gris moyen
- On applique une correction d’exposition (si on a de la chance: rien)
- On déclanche
Parmi toutes ces approches on choisit souvent la plus rapide à l’execution (souvent D qu’on peut réduire à 2 points). En combinant les modes de mesure d’exposition et les modes de prise de vue (M, Av, Tv, P) de façon adéquate à chaque situation on peut être très très rapide.
Pour conclure, il n’y a pas de secret et au final ce qui fait la fiabilité d’une exposition c’est le cerveau derrière l’appareil. Car à force d’experience il sait comment le mode de mesure choisi pour la cellule de son appareil va interpréter la scène. C’est ce qui lui permet d’appliquer la bonne correction d’exposition à chaque fois.
Ce n’est pas sorcier mais sans un minimum de pratique il est difficile d’être régulier dans ses résultats. C’est aussi la raison pour laquelle la plupart des photographes experimentés n’utilisent que 2 modes:
- Un mode généraliste: mesure évaluative/matricielle ou plus rarement de nos jours: la mesure pondérée centrale
- Un mode spécialisé: la mesure spot, mais c’est une utilisation qui représente sans doute moins de 10% du temps
En effet pour laisser au cerveau le temps de s’habituer à un type de mesure il est préférable de ne pas passer de l’une à l’autre sans arrêt.
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