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Photo-Argentique XPRO Rollei CR200, Zeiss Ikon

Un des problèmes de la photographie, et également l’incontestable raison de son succès, est qu’elle peut être utilisée pour obtenir d’une scène un rendu distinctement réaliste.

De fait la faisant apparaître comme un moyen de capturer de la réalité, dans une boîte, sur film et papier.

Cela ne pourrait être plus faux bien entendu, quand bien même, le niveau d’automatisation et de technologie enracinés dans ce procédé est tel qu’il donne sans aucun doute au quidam un sentiment d’objectivité que la peinture, presque par définition, ne transmet certes pas.

Lorsque la photographie est entrée dans le royaume de la couleur, il fut encore plus évident que la frontière entre le concept d’une certaine représentation de la réalité, et la réalité elle-même, devenait encore plus floue.

Au point même de disparaître entièrement pour certains individus convaincus de la nature « fidèle à la réalité » d’une photographie. Poussant parfois la confusion jusque dans des territoires dangereux aux conséquences malheureusement néfastes.

Mais soyons honnêtes, sur un plan purement technique, il est beaucoup plus difficile d’obtenir une palette de couleurs réalistes et harmonieuses qu’une palette de couleurs complètement irréalistes. Donc une palette de couleurs farfelues peut apparaître comme un bon écran de fumée derrière lequel dissimuler un manque d’expertise technique solide. C’est d’autant plus vrai, qu’il est en pratique très difficile d’obtenir une palette de couleur réaliste et harmonieuse.

Pour autant les couleurs irréalistes dans le royaume de la photographie couleur font pencher la balance vers un trait, un caractère, propre à la photographie noir et blanc : où l’image est de façon beaucoup plus évidente perçue comme étant juste une certaine représentation (choisie, espérons le) de la réalité, et seulement cela : juste une représentation parmi tant d’autres possibilités.

Installant par conséquent une distance beaucoup plus grande entre la perception d’une représentation fidèle à la réalité et ce que la photographie elle-même peut convier : « une idée d’une scène », enracinée il est vrai, dans la réalité de cette scène telle que perçue par le photographe qui en a fait l’expérience. Mais on en reste pas moins plus immédiatement captivé par cela : « une idée d’une scène ».

C’est là, la toute puissance des couleurs irréalistes me semble-t-il.